S’il y a bien une nouveauté de cette année que j’attendais impatiemment, c’était bien Imago, dernier tome de Xenogenesis, trilogie écrite par Octavia E. Butler dont j’ai adoré le premier tome, un peu moins le second. C’est parti pour la suite !
100 ans après avoir été sauvés de l’extinction sur Terre par les oankalis, les derniers humains vivent isolés, ignorant encore tout de la colonie martienne prête à les recevoir.
Premier enfant hybride issu de l’union entre humains et extraterrestres, Jodahs s’aventure avec espoir loin de sa famille à la recherche de compagnons.
Je ne vais pas vous mentir : j’avais hâte de lire enfin ce troisième volet de la trilogie Xenogenesis, mais aussi un peu d’appréhension. En effet, le second tome a été plus complexe à lire pour moi, notamment à cause du personnage principal auquel je n’ai pas accroché. Petit avertissement avant de démarrer : cette chronique contient des spoilers sur les tomes précédents. La chronique du tome 1 est ici, et celle du tome 2 là.
Dans Imago, on suit Jodahs, un autre enfant de Lilith et Nikanj, l’Ooloi de leur famille, qui entame doucement sa métormophose, sorte de passage à l’âge adulte, qui déterminera son sexe futur, à savoir mâle ou femelle. En effet, les Oankalis refusent au moment du récit que les couples hybrides forment de nouveaux Ooloi, êtres puissants capables de manipuler la génétique.
Pas de chance pour Jodahs, c’est dans ce chemin que le conduit cette métamorphose, interdite par les siens et pourtant inévitable une fois démarrée. Lui qui pensait devenir mâle, le voici plongé dans ce changement complexe : en effet les Ooloi manipulent la génétique, certes, mais sont aussi guérisseurs, tueurs, et servent de mémoire génétique à tout ce qu’ils touchent. Ils sont également les piliers du « trouple Oankali », formé d’un Ooloi, d’un mâle et d’une femelle Oankali.
Le récit se fait à la première personne, et il est d’abord assez touchant, les transformations de son corps et de ce que fait subir bien malgré lui Jodahs à son environnement et à ses proches sont intéressants à suivre, et on peut l’assimiler facilement à l’adolescence humaine, période peu évidente.
Assez vite, notre jeune Ooloi est cependant envahi d’hormones et ne rêve plus que d’une chose : trouver des compagnons humains pour s’accoupler et former le fameux trouple. Etant dans sa peau, il est difficile de ne pas compatir à son désespoir et à sa crainte de ne pas trouver de compagnons, et pourtant, difficile de ne pas être horrifié.e quand il finira par trouver les humains dont il a besoin.
En effet, les Ooloi manipulent les gènes, mais aussi les hormones et phéromones sans scrupule, pour inciter les humains à s’accoupler à eux. De là, Octavia E. Butler nous invite à nous interroger sur la question du consentement, à travers ces humains qui passent du dégoût et de l’hostilité, à un désir sexuel irrépressible les faisant devenir compagnons malgré eux de l’Ooloi.
L’autrice ne s’arrête pas là : les Ooloi étant guérisseurs, il est aisé pour eux de soigner les humains déformés, malformés et de les « sauver », parfois malgré eux. Et là, se posent les véritables réflexions à mon sens du roman. Rappelons que les Oolankis sont arrivés à une période où les Humains étaient en voie d’extinction, et les ont mis devant un ultimatum : ou bien ils s’accouplent avec cette étrange race extra-terrestre, ou ils sont stérilisés. Quelques décennies plus tard, le choix sera l’accouplement ou l’exil sur Mars, en cours de terraformation.
Octavia E. Butler interroge ici les rapports dominés-dominants, les colons qui se posent en « sauveurs de l’humanité », mais qui n’en sont pas moins dominants et esclavagistes de la race humaine. Ne dit-on pas que l’enfer est pavé de bonnes intentions ?
Pour moi, Imago est le meilleur volet de la trilogie Xenogenesis et je vous le recommande sans réserve, ainsi que toute la trilogie. Cependant, n’attendez pas des romans faciles, heureux, mais au contraire des romans qui font réfléchir, nous mettent mal à l’aise, et nous poussent dans nos retranchements.
Participation au « Challenge marsien (autour de la planète Mars) – 2ème édition, lancé par Ta d loi du cine sur le blog de dasola, jusqu’au 31 mars 2025″
D’autres avis : Le nocher des livres, Gromovar, Outrelivres, ….
J’ai survolé pour ne rien me divulgacher (même si je ne m’en souviendrais certainement pas ^^’) mais je suis content de voir que ça finit en apothéose. Il fallait déjà que je lise cette série parce qu’Octavia Butler mais là ça donne encore plus envie ! Enfin, « envie » parce que j’ai bien compris que ça ne sera pas du pur plaisir.
C’est tout à fait ça, et en plus, tout est sorti maintenant, donc, aucune excuse pour t’y mettre !
C’est le moment où je passe dire qu’il faut VRAIMENT VRAIMENT VRAIMENT que je lise Octavia Butler
Je ne peux qu’approuver ce message 😀
J’avais en tête d’essayer de lire cette autrice, mais le côté malaisant me rebute un peu… à voir si je me lance un jour !
Après c’est un peu malaisant, oui, mais pour la bonne cause ! Il faut la lire ! Il y a d’autres écrits d’elle moins dans ce style-là je pense.
Je suis ravie que tu aies aimé. Ce que tu en dis ne me tente pas du tout, j’ai tendance à penser que j’aurais trop les cheveux dressés sur la tête, mais ce sont des réflexions pertinentes.
Merci 😉 je comprends très bien, après pour ma part c’est un peu ce que je recherche en ce moment, des livres qui poussent à réfléchir, donc, ça marche très bien.
Je ne vois pas à quelle date exacte est paru ce billet, mais ça affiche « 7 mois » et nous sommes en novembre… j’en déduis donc que ce soit être en avril 2024! Dans ce cas, il serait tout à fait éligible pour être référencé dans mon « challenge marsien (autour de la planète Mars) – 2e édition », si vous l’acceptez.
Si OK, merci de m’en informer par commentaire (dans l’idéal, logo et lien vers le récapitulatif du challenge sont tout à fait rajoutantes chez vous, mais bon…).
(s) ta d loi du cine, « squatter » chez dasola
Bonsoir, oui l’article est paru en avril, et avec plaisir 🙂 je viens de rajouter le logo et le lien dans l’article.