La montagne dans la mer de Ray Nayler

L’année dernière, j’ai beaucoup entendu de bien de la première parution en français (autre qu’en nouvelles individuelles) de Ray Nayler, Protectorats. Sauf que vous connaissez mon allergie aux recueils de nouvelles, qui m’a fait passer son tour. Mais cet automne, son premier roman, La montagne sous la mer, est sorti, donc, plus d’excuse ! Il est illustré par Nicolas Fructus et traduit par Henri-Luc Planchat, chez Le Bélial.

Un mystère gît dans les hauts-fonds de l’archipel de Côn Dao…
Pour les Vietnamiens des environs, ce sont des monstres assassins.
Pour dianima, multinationale spécialisée en bio-ingénierie et en intelligence artificielle, il s’agit d’une opportunité sans égale.
Pour ceux qui ont la charge de percer ce mystère, c’est une révélation.
Mais trois choses ne font aucun doute.
L’esprit de ces créatures n’a rien à voir avec le nôtre.
Leur corps est doué d’une totale capacité de camouflage et d’imitation.
Et ils exigent que nous partions…

 Archipel de Côn Dao, Viêtnam, dans un futur proche, où la vie océanique est en voie de disparition. Sur cet archipel, une multinationale, dianima, a découvert une évolution particulière des pieuvres et l’étudie dans l’ombre. Nous suivrons 3 fils narratifs différents : une scientifique, Ha Nguyen, chargée d’étudier le mystère des pieuvres, un homme en haute mer prisonnier d’un chalutier, et un hacker chargé de détruire une IA de l’intérieur.

Parlons d’abord du mystère de l’archipel : les Vietnâmiens sont convaincus de l’existence de pieuvres meurtrières, tandis que Ha et son équipe vont bien vite se rendre d’une réalité différente : les pieuvres ont formé une société à part entière. Outre les pieuvres, on retrouve également Atlantsegseg, vétérante cheffe de la sécurité, et Evrim, androïde pourvu d’intelligence artificielle recluse.

L’étude des pieuvres est extrêmement intéressante : ce sont des animaux reconnus pour leur intelligence, et la manière dont ils sont présentés ici est fascinante, quoique un poil flippante…. Au fil du récit, le sujet de l’IA sera approfondi notamment par le personnage d’Evrim. Comment vivre en ayant conscience de sa différence, et surtout de la crainte générée ?

Ensuite, le chalutier. Nous sommes très clairement sur un navire esclavagiste, où la vie ne tient qu’à un fil, et surtout au profit. Cette partie-ci m’a moins intéressée, même si le concept d’un navire intelligent est plutôt intéressant.

Enfin, le hacker. Il est chargé d’infiltrer le cerveau d’Evrim, et se montre clairement impitoyable. Cette partie a un côté un peu cyberpunk, mais n’est pas à mon sens la partie la plus passionnante.

La montagne dans la mer est un roman intelligent, mais aussi lent. Il ne faut pas s’attendre à de l’action un peu partout, mais plutôt à de la réflexion, tirant même parfois sur la philosophie, notamment avec Evrim. Ray Nayler dénonce également la surpêche et l’exploitation de nos océans, mais interroge surtour sur les dérives de l’IA. On parlera aussi premier contact, et de la difficulté de communiquer avec des êtres si différents de nous. Vous l’aurez compris, ce n’est pas un roman facile, mais c’est aussi un coup de coeur pour moi.

D’autres avis : Le Maki, Gromovar, Celindanaé, L’épaule d’Orion, ….