Octavia E. Butler étant une autrice qui m’a convaincue, notamment avec sa trilogie Xenogénésis, on continue à explorer sa bibliographie, avec Liens de sang, sorti en 1979 en langue originale et en 2000 en France, avant d’être réédité par Au Diable Vauvert en 2021.
Dana, jeune femme noire d’aujourd’hui, se retrouve propulsée au temps de l’esclavage dans une plantation du Sud et y rencontre ses ancêtres…
UN ROMAN D’AVENTURE QUI EXPLORE LES IMPACTS DU RACISME, DU SEXISME ET DE LA SUPRÉMATIE BLANCHE.
« Je la tiens pour une des auteures les plus inspirantes de notre génération. » Virginie Despentes
Vous vous en doutez peut-être déjà, mais Liens de sang n’est pas un roman pour les âmes sensibles. Nous y suivrons Dana, jeune femme noire des années 70, transportée dans au temps de l’esclavage, dans une plantation du Maryland.
Ne cherchez pas trop d’explications sur le phénomène : Rufus Weylin, fils blanc du propriétaire de la plantation, est un lointain ascendant de Dana, et il semble l’invoquer dans son époque à chaque fois qu’il est sur le point de mourir ou le croit. De même, Dana reviendra à son époque par le même procédé.
Il est important de tenir du compte du fait que Liens de sang a été écrit dans les années 70 et que Dana et Kevin, son mari, n’ont pas accès aux ressources modernes comme à notre époque. Ils connaissent bien sûr l’esclavage, mais rien ne les préparait à une immersion réelle.
A la plantation Weylin, on a les esclaves de la maison, domestiques qui servent la famille Weylin et qui sont relativement bien traités dans la mesure où ils obéissent sans poser de questions, et les esclaves des champs, soumis à un traitement bien plus rudes, que ça soit par leur travail physique, ou par la dureté des surveillants. Tom Weylin, le père de Rufus, est un homme de son temps : dur, cruel, qui considère ses esclaves comme ni plus ni moins que des biens meubles et n’hésite pas à en vendre pour de l’argent, ou à conserver/bien traiter une « bonne reproductrice ».
Les différents personnages sont plutôt intéressants : nous avons notamment Sarah, cuisinière et intendante non-officielle de la maison, qui semble se conformer sans trop de soucis à sa condition, mais qui est en fait soumise à la peur de perdre son dernier enfant, les précédents ayant été vendus. Kevin, le mari de Dana, est également un personnage à retenir : dans son époque, il ne semble pas avoir conscience de ses privilèges, mais le séjour forcé dans le passé le fera évoluer….
Dana rencontrera bien vite Alice, son ancêtre, petite fille noire libre, et amie d’enfance de Rufus. La relation entre les deux personnages constitue une grande partie du roman : en effet, si Alice et Rufus s’entendaient bien enfants, la société a bien vite repris sa place en grandissant, et Rufus ne rêve que d’une chose : contrôler la vie sexuelle d’Alice et la prendre comme concubine. Problème : Alice est libre et a choisi d’épouser un autre homme. Malheureusement pour elle, dans le Maryland, la liberté pour une femme noire est bien fragile….
Liens de sang interroge sur la faculté de nos sociétés à construire des personnes pleines de préjugés et de racisme. Quand nous rencontrons Rufus pour les premières fois, ce n’est rien d’autre qu’un enfant comme les autres. Mais plus il grandit, plus sa condition d’homme blanc et la société de son époque impacte sa personnalité, pour en faire un propriétaire de plantation cruel et raciste.
Ce roman d’Octavia E. Butler n’est pas mon préféré : j’avoue avoir eu du mal à entrer dans l’histoire, à cause du procédé narratif, et ne pas avoir réellement pendant ma lecture pris l’importance de la période d’écriture du roman, à une époque où on est bien plus informé sur l’esclavage. Liens de sang n’en reste pas moins un roman très intéressant et important sur cette triste période de l’Histoire, et on ne peut que le recommander.
Ça se rapproche plus de « La Parabole du semeur » que de « Xenogénésis », non ?
Ca ne doit pas être une lecture facile n’empêche.