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Avec joie & docilité, de Johanna Sinisalo

J’ai repéré Avec joie & docilité il y a des années, à l’occasion d’une chronique chez Lhisbei, et mon challenge ABC Littératures de l’imaginaire avec la contrainte spéciale autrice que je me suis imposée était l’occasion idéale de le lire enfin !

République Eusistocratique de Finlande, 2013. La nation a pris en compte ses erreurs historiques. La stabilité sociale et la santé publique sont désormais les valeurs prédominantes. Tout ce qui procure du plaisir ou est susceptible de causer une quelconque dépendance est formellement interdit, y compris le café. À une exception près, le sexe. Dans la République Eusistocratique de Finlande, la distribution de sexe, un produit de consommation essentiel, doit être aussi efficace que possible. À cet effet, le corps scientifique gouvernemental a généré une nouvelle sous-espèce humaine, une espèce réceptive, soumise et toujours disposée. Autrefois, on les appelait les femmes.

Le ton est donné dès la quatrième de couverture, ici, place à un futur qui ne fait pas du tout rêver ! Dans ce monde futuriste (mais pas vraiment puisque nous sommes en 2013), les Finlandais ont décrété que notre monde est dépravé, et que tout doit être contrôlé : bienvenue la prohibition, mais aussi les restrictions de tabac, des substances nocives, et surtout, procurons aux habitants une vie saine, avec un foyer bien classique, un papa une maman.

A cet effet, la République Eusistocratique de Finlande a entrepris de domestiquer les femmes grâce à l’eugénisme. Les élois sont des femmes blondes, élancées, belles, et surtout dociles, qui s’épanouiront dans la maternité, et les morlocks sont tout leur contrainte, brunes, indisciplinées, etc., mais surtout stérilisées ou même tuées à la naissance.

Nous suivrons ici Vanna/Vera et Manna/Mira (leurs prénoms doivent être « doux »), deux soeurs qui vivent à la campagne avec leur grand-mère. L’une est la parfaite éloi, l’autre, Vanna, une morlock qui parviendra à dissimuler sa nature avec l’aide de sa grand-mère. Quand le récit commence, Manna s’est mariée à un virilo, mais a disparu peu de temps après son mariage. Vanna est quand à elle à l’école ménagère, et commence une substance interdite, le piment, à l’aide de Jare, virilo connu plus jeune.

Ne vous attendez pas à un récit linéaire : Johanna Sinilaso nous offre non seulement le point de vue de Manna, mais aussi celui de Jare, entrecoupés d’articles, de textes de loi, etc., le tout extrêmement intéressant pour mieux comprendre la société finlandaise démontrée ici.

Côté thématique, nous sommes bien évidemment sur l’objectivation de la femme, réduite ici à son rôle de bonne petite femme au foyer bien docile et pas bien intelligente. Cependant, on parlera aussi société de consommation, plaisir, et drogues, notamment avec l’intrigue tout autour du piment, devenu addictif à cause de la capsaïcine qu’il contient, mais aussi état totalitaire. Soyez prévenu.e.s : si vous êtes un tant soit peu sensibilisé.e.s aux droits des femmes et plus globalement des êtres humains, vous risquez d’être en colère une bonne partie de Avec joie & docilité.

J’aurais vraiment voulu avoir un coup de cœur pour cette dystopie qui est sans nul doute très intéressante sur bien des points, mais j’avoue que Johanna Sinisalo m’a un peu perdue avec ses histoires de piment, qui m’ont moins captées que le reste. Cependant, ce sera pour moi un grand plaisir de découvrir le reste de sa bibliographie publiée chez Actes Sud, et je ne peux que vous conseiller Avec joie & docilité, qui reste un roman féministe aux allures de thriller diablement efficace !

D’autres avis : Lune, Gromovar, Lhisbei, Yogo, Le chien critique

 

Chronique écrite dans le cadre du challenge ABC Littératures de l’Imaginaire organisé par MarieJuliet, et me permet de compléter la lettre S de Sinisalo. Retrouvez mon billet d’inscription à ce challenge ici !

shaya

15 réflexions sur « Avec joie & docilité, de Johanna Sinisalo »

  1. Texte pas sans défaut, mais le message a le mérite d’être très clair. Et il est important d’ailleurs ce message, ce qui n’empêche pas le roman d’être écrit sur un ton plutôt léger. Bref, ça fait mouche ! 😉

  2. Des années après, je ne me suis toujours pas habitué/remis de cette couverture.
    Je reste sur un « mouais », je ne crois pas avoir envie d’être en colère, même si je ne doute pas que le livre soit intéressant et utile.

  3. J’avais trouvé l’autrice très intéressante en conférence aux Imaginales, faudra que je m’intéresse à ses écrits un jour… ceci dit c’est pas celui que j’ai le plus envie de lire là comme ça.

  4. Je l’avais repéré aussi, même si en réalité je le vois plus comme une lecture « faut que » qu’une lecture « j’ai envie de », ce que ton avis vient confirmer. Au final, ce sera un jour peut-être s’il croise mon chemin. En tout cas, tu m’as intriguée avec cette histoire de piment. ^^

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